Mes impressions sur la pédagogie Montessori à tête reposée.

Je reprend ma plume parce que ça trotte dans ma tête depuis que j'ai terminé cette formation Montessori. 
Maintenant que j'ai mis un peu d'ordre dans mes pensées, et que j'ai bien trié les enseignements que j'en ai tiré par âge, j'ai envie de mettre tout ça noir sur blanc.

Je dois même dire que ça me travaille sérieusement, au point d'en faire des cauchemars éveillée, je m'imagine OBLIGÉE d'appliquer la méthode Montessori, sous prétexte d'avoir été formée (en partie) ...  obligée de me débarrasser de 99% de mon matériel, j'imagine alors les enfants, tendant les bras vers mes bras chargés me suppliant en pleurant "je le veuuuux"... (bon ok j'exagère...)

Mais tout de même : j'ai suivi cette formation parce que je suis sensible à la pédagogie Montessori, parce qu'elle respecte l'enfant, son rythme... et parce que son application réside, en grande partie, et je le savais déjà, par l'observation celui-ci, mais je ne m'attendais pas à tant de rigueur.

Et je ne regrette pas d'avoir suivi cette formation qui a répondu à mes attentes :
- notre formatrice a été très bien, elle a répondu aux nombreuses question qui lui ont été posées, sans problème, sans avoir à calculer quoi que ce soit,
- elle a fait preuve de souplesse, j'imagine qu'en tant que formatrice elle est sensée se tenir à un certain programme...
- j'ai énormément appris (périodes sensibles...),
- j'ai beaucoup compris (nécessité d'utiliser un matériel simple et ciblé),
- j'aime encore plus l'idée d'observer l'enfant, puisque j'ai maintenant encore plus d'outils (j'en avais déjà quelques uns pour d'autres domaines depuis mes dernières formations),
- j'ai envie de faire des aménagements (petits aménagements, ça reste ma maison) pour leur permettre d'être plus autonome entre autres

 ......j'ai juste des doutes sur l'ouverture d'esprit des adultes, qui, pour ce qui concerne les "purs montessorien", ne feront preuve d'aucune souplesse : j'ai l'impression que les héritiers de cette pédagogie ne font que reproduire  à la lettre les expériences que M.M. a réalisé, et je me demande si M.M. avait alors conscience qu'il en serait ainsi des décennies plus tard, sans que jamais personne de tiennent compte de l'évolution de notre société (à ce que j'ai compris seul quelques matériels ont été ajoutés).

Je dis bien "expérience", parce que M.M. était une scientifique, elle a consacré sa vie à faire des recherches, et quand on fait des recherches on suit un protocole, on ne peut changer celui-ci sans quoi l'expérience est faussée. Elle a poursuivi ses expériences jusqu'à obtenir le meilleur résultat possible (notre formatrice nous confiera d'ailleurs qu'elle était plutôt imbus de sa personne).

Bien... mais moi j'ai l'impression qu'il serait temps de sortir du stade de l'expérience  et de revenir au présent, de sortir de cette rigidité. Je ne peux m'imaginer un enfant évoluant dans une univers il n'y aurait pas de poupée... pas de petites voitures... pas de jeux de constructions qui permettraient de laisser libre court à l'imagination... (ou tout autre matériel qui serait jugé inutile car n'apporterai rien), et donc uniquement composé d'objets aux couleurs neutres et aux formes géométriques parfaites.

Notons quand même la présence d'une poupée de chiffon pour les moins de 1 an qui n'est présente que pour ses jambes de formes cylindriques et la "tour rose" pour les 3/6 ans qui voudrait construire... une tour rose..., et là je vous ai bien eu, puisqu'en réalité l'objectif de celle-ci est : "Discrimination visuelle des dimensions (raffinement sensoriel), Développement de la volonté et de la concentration. Construction de la pensée logique. Préparation indirecte aux mathématiques. Construction de l’intelligence", donc les seules constructions envisagées concernent seulement l'esprit.
Je trouve ça très triste :-(

La pédagogie de M.M. se rapproche de celle d'E. Pickler pour ce qui concerne les tous petits, qui consiste donc à ne pas entraver l'enfant et à le laisser libre de découvrir son environnement, ça me convient tout à fait ! Même si mon vécu me fait légèrement douter de la nécessité de ne pas mettre l'enfant dans une position qu'il ne serait prendre seul...mais c'est une autre histoire...

On ne va pas lui montrer comment fonctionne le matériel qui lui a été mis à disposition, on ne va pas non plus le lui mettre en main, il va pouvoir laisser libre court à sa créativité...

J'aime le fait de laisser l'enfant choisir et découvrir les possibilités d'un matériel par lui-même, le laisser se triturer les méninges, tant pour arriver à l'attraper que pour trouver ce qu'il peut en faire...

L'attitude de l'adulte, si ce n'est le fait qu'il observe discrètement et prend pas mal de notes, n'a pas été évoquée en formation, j'ai peut-être été distraite, ou alors il n'y a rien à dire parce que justement il n'a rien d'autre à faire... J'aime aussi l'idée du Nido, même si encore une fois rien n'est laissé au hasard, jusqu'à la déco (sobre)

Mais surtout la grosse différence avec tout ce que j'ai pu voir lors de mes différentes formations, c'est la DISTANCE de l'adulte, qui observe donc... DE LOIN.

Lors de mes précédentes formations ("troubles du langage"et "gérer les situations difficiles de l'enfant" pour les plus récentes), l'accent a toujours été mis sur l'importance de la proximité, des regards les yeux dans les yeux, des paroles, des échanges... pour consolider les connexions cérébrales...
En formation Montessori on nous parle également de connexions et de plasticité cérébrale, mais si l'enfant doit se contenter des moments où l'adulte lui prodigue les soins, cela me semble insuffisant, même s'il est alors 100% avec lui !

Ne parlons pas non plus du fait de coucher un nourrisson, quelque soit son âge, sur un matelas au sol (peut importe la taille), la couverture ovale sur laquelle il repose et qui l'accompagne en permanence reste son seul réconfort, heureusement notre formatrice nous dit que l'on peut encadrer l'enfant d'un coussin d'allaitement pour qu'il ne se sente pas "perdu", ça me rassure (même si je ne suis pas sure que ce soit "montessorien"), quand on sait combien les nourrissons ont besoin de contact, de se sentir protégé.

Si M.M. perçoit les lits comme des cages, j'aimerai bien que l'enfant qui a été traumatisé par son lit à barreau lève le doigt, j'ai plus eu vent d'enfants effrayés de se retrouver dans un grand lit sans aucune protection. Mal habitué ?

Autre remarque : c'est ce qui m'a toujours été appris et répété lors de mes autres formations, et c'est ce que j'ai envie de croire : "si l'enfant a un besoin il faut y répondre", et pourtant pour Pickler l'enfant va devoir attendre son tour avant de voir son besoin assouvi, afin que celui dont on s'occupe en cet instant ne pense pas qu'on l'abandonne au profit d'un autre.
Pour moi c'est une situation à gérer au cas par cas, mais pour ces professionnelles pas d'exception ! Personnellement j'y ai vu plutôt une façon de ne pas se retrouver en retard dans le travail à faire...
Je me demande ce que penserait la PMI si je laissais pleurer un enfant le temps qu'un autre prenne son repas de midi...

Ce qui m'a beaucoup surpris aussi c'est le grand changement une fois l'enfant arrivé à l'âge de 2 ans 1/2 ou 3 ans, celui des "présentations", ça ne rigole plus, lui qui jusque là a pu découvrir les quelques jeux matériels qu'on lui propose à sa guise devra désormais avoir l'approbation de l'adulte avant d'en utiliser un nouveau, et celui-ci devra impérativement faire l'objet d'une présentation.
Le matériel qu'il aura le droit d'utiliser ne devra pas être détourné, pas question de mimer "à dada" avec le cheval en plastique : il est là pour représenter l'animal en 3D, c'est tout ! Si l'enfant est surpris en flagrant délit et bien l'activité est stoppé.
Heureusement l'école qui nous a formé a choisi d'installer dans une autre pièce un espace de jeu libre qui sera alors proposé à l'enfant, mais ce n'est pas le cas partout ! Ce n'est pas "montessorien" !

Si je peux trouver ça normal à l'école, qui a ses règles de vie et où tout est mis en œuvre pour favoriser ses apprentissages, je ne me vois pas en tant qu'assistante maternelle, ni en tant que maman si mes enfants étaient plus jeunes :
- ne proposer à un enfant de 30 mois qu'une dizaine de "matériels" (c'est au dessus de mes forces)
- que je lui aurait préalablement présenté (sinon pas touche),
- que je lui empêcherai de détourner (même si ici il est interdit de transformer l'assiette de la dinette en soucoupe volante),
- le laisser s'ennuyer parce qu'il ne souhaite faire aucune des activités proposés (même si un peu d'ennui est utile)
- sous prétexte que les autres matériels ne sont pas encore adaptés à ses capacités (bon là ok, mais dans ce cas il faudrait lui en proposer davantage ! ou est-ce là une façon de finalement l'obliger à s'y mettre ? d'ailleurs je croyais qu'il fallait que son environnement soit adapté ! rhooo...)
 - lui interdire l'imaginaire (ok pour les écrans, mais quand même le jour où il va voir un dessin animé à la tv il va avoir peur !!!!)

La formation était ouverte aux mamans également donc je ne peux qu'imaginer que ces "ambiances"  sont sensées être reproduites à la maison, donc "H24"!

À l'entrée à l'école, dès 3 ans, l'enfant ne jouera plus avec ses copains, pas de contact (et contact minimum avec l'adulte également, à moins que l'enfant ne soit en détresse mais là ça reste personnel à notre formatrice), pas de récréations...
Euh... il est passé où mon petit monde merveilleux ?

Il me semble que l'assistante maternelle doit trouver un juste milieu, ne serait-ce que pour être un tant soit peu en adéquation avec le milieu familial. En tant que maman je n'aurai pas voulu d'une ass mat ou crèche "pure montessori".

Enfin bref mon plus gros questionnement d'aujourd'hui c'est de savoir si je peux ajouter sur mes documents (CV, annonces...) cette formation si je n'ai pas l'intention d'en suivre certaines directives, faute de moyens (espace) et faute... d'envie... Il ne faudrait pas non plus tromper le client !